L'univers de Florence Bremier est peuplé de dieux, de nymphes, de créatures merveilleuses aux pouvoirs étranges, et, bien sûr, de mortels plus ou moins ordinaires. Avant de lire Les héros sont fatigants !, j'avais écouté Florence en parler à ses visiteurs de salon. C'est une conteuse, une vraie, qui adapte son récit à la personne qui lui fait face, exposant au passage les subtilités d'un monde tour à tour envoûtant, féroce, tendre ou magique : celui de la mythologie grecque. C'est une conteuse parce qu'en parlant de ses livres, très vite elle dérive et donne envie de plonger avec elle dans un bain de personnages et d'aventures. Et, de fait, j'ai plongé. Les héros sont fatigants !, c'est une épopée, un voyage en bateau (le Titaniké, commandé par le capitaine Némos) au départ de la Grèce antique vers des mers inconnues. La (pas si sage...) reine Pénélope a confié à sa fille Enicéa une mission : retrouver Ulysse, son mari, qu'elle trouve parti depuis bien trop longtemps. On l'apprendra à la fin, Pénélope en a assez de lui être fidèle, mais elle ne saurait le tromper en son absence... Enicéa va donc embarquer, travestie en marchand, sur le Titaniké en compagnie d'une brochette de personnages curieux, dont l'un est, elle le sait, son pire ennemi car il n'est autre qu'un de ces innombrables prétendants qui ne vivent que pour une chose : tuer Ulysse pour lui prendre son trône, et sa belle Pénélope...
Dans Les héros sont fatigants !, les aventures se succèdent rapidement, les personnages s'épient, se battent, s'aiment, se cherchent ; les dieux eux-mêmes interviennent, se disputent et s'amusent ; les monstres et les magiciens tentent de jouer leur rôle. Le récit est parsemé de jeux de mots (il y a une séquence très belle avec des arbres dotés de la parole : je ne penserai plus jamais à l'orme, au tilleul ou au noyer de la même manière), faisant intervenir dans ce monde antique des personnages anachroniques (Calypso, par exemple, éprise d'un commandant Costaud, ou l'encore plus improbable apparition d'Omar Radad à l'issue d'un combat héroïque). Florence Bremier ne fait pas ici l'étalage de sa connaissance (considérable) de la mythologie : elle s'en sert d'une manière habile pour offrir une histoire extraordinaire à plus d'un titre. On est dans le roman d'aventure, le polar, l'historique, le comique, le mythologique, tout cela mêlé pour faire un roman inclassable, qui doit plaire quel que soit l'âge (pas trop jeune, quand même) et d'une densité rare.
L'édition actuelle est épuisée (l'éditeur a fermé), mais ce livre devrait retrouver prochainement les rayons des libraires, pour rejoindre son petit frère (Le signe de Dédale - Editions Oskar). C'est tant mieux.
A noter que Les Héros sont fatigants ! a fait partie de la sélection 2011 du prix marseillais du polar. Le signe de Dédale fait lui aussi partie de la sélection 2014 de ce même prix, verdict le 20 septembre à Marseille. On croise les doigts... (peut-être une intervention du dieu Hermès ?)
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