Le roman commence par une manif' comme je n'en ai jamais vue, ou lue : tout ce que la société compte de ramollis de la bondieuserie défile dans Paris en réclamant à cor et à cri le retour en urgence des messies. Toutes les croyances sont là, du catho du coin au Jéhovah moyen en passant par le musulman, le juif, le bouddhiste, le sikh, le sorcier vaudou j'en passe des pire et des palanquées : ils sont tous là. Il faut dire que les temps sont durs, Arthur : les rats ont envahi la capitale et des milliers de tonnes d'ordure pourrissent en plein air et la vie des Parisiens. Le bordel est général, visible, palpable et olfactif.
Une des premières répliques de Kubitschek, le personnage central, résume assez bien le genre d'homme qu'il est :
- [...] Une manifestation pour quoi ? Ou plutôt contre quoi ?
- Pour demander le retour de l'envoyé de Dieu sur terre.
- Pourquoi un représentant, ils n'ont qu'à demander Dieu lui-même. Qu'est-ce qu'il fout là-haut, il n'a plus rien à faire ?
- Je sais pas, dit Farida en détournant la tête.
- Tu ne te poses même pas la question ?
- Non.
- Il a une grande queue et il baise.
- Ah non, ne dis pas ça, monsieur, j'ai honte pour toi..."
Kubitschek va crever, mais d'abord il va se venger. Je n'en dis pas plus, les péripéties des malfrats, flics, putes et originaux divers qui évoluent dans ce Paris glauque ne sont pas l'essentiel. Ce qui m'a plu avant tout, ce sont ces personnages, leurs conversations et l'ambiance "pessimisme assumé" qu'ils dégagent. Les dialogues et les répliques sont pleins de drôlerie, mais aussi d'un mélange savant de dureté et de tendresse. J'ai lu, mais en même temps j'ai vu, entendu, senti. Il n'y a plus d'espoir, mais pas vraiment de désespoir.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire